THE LAST DAY

Repartir et déjà revenir...
Jeudi matin, nous avons pris le train pour Bucarest, laissant derrière nous Sibiu et ses maisons aux yeux globuleux. Six heures de trajet pour brasser une dernière fois la diversité des paysages roumains. Ses collines escarpées, ses vallées verdoyantes, ses rivières. Je suis étonnée par l'immense chantier d'aménagement de ce qui semble destiné à être un barrage. Sur les quelques 300 km qui séparent Sibiu de Bucarest, les ouvriers creusent, déblaient, remblaient le lit de la rivière.
Dans la capitale, nous retrouvons les 36°C que nous avions laisss. Chaleur étouffate mêlée à la pollution. Crissements de pneus, coups de klaxon. C'est assourdissant. On ne fait pas long feu dans les ruelles. Nous préférons retrouver l'appartement d'Adina et Octav'. On y déguste quelques bières au soir... Ursus, Timisoeara, Tuborg... Pas de quoi cuisiner dans le logement, alors on improvise un pique-nique sur le lit, à l'abir de la pluie qui innonde le balcon.
On se raconte nos anecdotes respectives, on montre et on prend des photos. Et puis les amis de mes couchsurfeurs me parle des Marmures, au nord du pays. Les églises en bois, les montagnes, les tenues traditionnelles. Je regarde sur le net le prix des billets d'avion... Je peux me rendre à Cluj au départ de Paris-Beauvais pour 80 €. Adina me confie qu'elle m'accompagnerait volontier.
Prochain départ pour la Roumanie fin septembre début octobre certainement.

JOUR 10

Ca sent la fin...
Petite journee. Apres une balade dans les ruelles, mon estomac m`a fait comprendre qu`il n`avait pas apprecie l`eau du robinet de Brasov. Cecile est partie decouvrir la campagne autour de Sibiu. Rien d`exceptionnel a l`entendre. Moi j`ai fait le musee d`ethnographie pres de l`hotel, entre deux siestes.
Et puis, l`avantage d`etre dans une auberge de jeunesse, c`est qu`on voit des baroudeurs debouler regulierement. Cet aprem, un jeune francais qui a pris son sac a dos pour un periple de deux ou trois semaine a travers la Roumanie, la Bulgarie et peut-etre la Turquie... finir a Istanbul.
Demain le train donc, pour Bucarest.

JOUR 9

Maison transylvanienne de Sibiu.

Bienvenue a Sibiu...

J`ai bien cru que nous ne parviendrions pas a quitter cette fichue ville de Brasov. D`abord, Cecile, qui s`est rendue compte arrivee a la gare qu`elle avait oublie son telephone portable a l`hotel. J`ai du l`attendre 30 minutes sous la pluie orageuse, le temps qu`elle fasse l`aller-retour. Ensuite, le bus que nous devions prendre a 11h30 a ete annule a la derniere minute. Bon, nous optons pour le train de 13h01... Qui ne nous a arrache a Brasov qu`a 13h45. Enfin !

Bon, ca en valait la peine. Sur la route, entre deux roupillons (bah oui elle fatigue la vivige), je remarque a nouveau des charettes en bois, des fermiers qui taillent les champs a la main.

Nous sommes arrivees vers 17h a Sibiu. Douce et calme cite. Presque personne sur la petite place ou se trouve la pension ou nous allons passer la nuit. Une charmante terrasse ou je deguste une soupe au poulet (un bouillon en fait), pour a peine 2 euros. L`architecture est maginifique. Presque toutes les maisons sont classees monuments historiques. Les eglises sont splendides. Les maisons ont toutes des belles-voisines qui semblent nous observer. Big brother is watching you...

Nous pensons prendre le temps de profiter de cette douce ville demain et d`embarquer dans le train pour Bucarest mercredi a 6h... du matin, oui oui, retrouver Alina et Octav pour une derniere soiree avant de regagner la France.

JOUR 8

Meurtrière dans le chateau du soi-disant Dracula.

De la piste bleue a Dracula...

Si vous aimez les vacances, disons, conventionnelles toursitico-touristiques, alors vous aimerez Brasov. Si vous etes plutot baroudeur routard, vous serez aussi decu que moi.
Ce matin, nous avons pris le bus dans l`espoir de faire une randonnee sympa dans les montagnes. L`endroit en question est en fait un enorme complexe hotellier en extension. On nous avait indique une telecabine, qui nous a emmene a 1800 m d`altitude. Mais ormis deux panoramas, on ne peut le nier, remarquables, point de chemin de randonnee a l`horizon. Nous avons du nous contenter d`une descente sur piste (la piste bleue de ski en periode hivernale) pas particulierement agreable.
On decide donc de se rendre au chateau de Dracula, a quelque 40 km de Brasov (Bran). Et la, meme sensation desagreable. Partout des touristes. Allemands pour la plupart. Le chateau n`est pas desagreable, mais on en a vite fait le tour.
Retour a l`hotel. Resto en terrasse et... sous la pluie. Premier orage depuis notre arrivee. Signe que nous avons passe suffisamment de temps dans ce coin beaucoup trop toursitique pour nous.

JOUR 7

Retour brutal a la civilisation...
Brasov, cite balneaire par excellence. Nous avons quitte Lucani (Bacau) ce matin pour prendre le bus pour Brasov. C`est le coeur lourd que j`ai embrasse Augusta, la mere de notre couch surfeur. La douleur a ete encore plus grande, quand, au fil des kilometres qui nous eloignaient de notre maison de reve, je constatais que nous entrions dans une region plus riche, plus occidentale.
De moins en moins de charettes sur la route, des machines agricoles apparaissaient meme dans les champs. Et puis, au milieu des Carpates, des concessionnaires auto, des panneaux publicitaires. Dur retour a la civilisation.
A Brasov, le charme tant attendu d`une vieille ville se dessine a peine. J`espere beaucoup de la randonnee que nous entendons faire demain dans les montagnes environnantes. Mais je ne ferai pas de vieux os ici. J`ai deja propose a Cecile de prendre le train des demain pour Sibiu. Sauf que l`on vient d`appremdre que le contact qui devait nous emmener voir les Roms n`est pas disponible...

JOUR 6

Famille de Roms qui a vécu à Lille.
Sur la route des Roms...
Nous voici pratiquement au terme de la premiere semaine. Je ne me lasse pas de ce pays magnifique. Melange de tradition et de modernisme. Je suis toujours etonnee de croiser les charettes en bois tirees par des chevaux sur les memes routes que les voitures.
Ce matin, notre guide nous a emmene a la Valea Seaca. Miracle ! Nous y avons retrouve la famille de Radija, la jeune Rom qui vit dans le village d`insertion de Fives. Mieux, nous avons rencontre des Roms qui ont vecu a Lille. Tandis que nous sommes invitees a venir voir la maison qu`ils construisent (les fondations en fait, puisqu`ils n`ont plus d`argent pour continuer les travaux), je reconnais un visage... Celui d`un garcon que j`ai vu a Lille. Il parle francais, evoque les stations de metro de la ville. Porte des Postes, Wazemmes, Gambetta. Sensation etrange de retrouver un visage connu au fin fond de la Roumanie.
Ici, ils vivent sans eau courante ni electricite. Ils percoivent au total, pour leur six enfants, 100 euros d`allocations par mois. Ils veulent revenir en France, meme pour vivre dans une caravane. Mais le top serait d`obtenir un mobil home. Nous les quittons a regret pour nous rendre a Bacau, ou Alina nous attend.
La jeune femme est professeur de francais dans un lycee. Quel bonheur de pouvoir dialoguer sans barrieres. Elle nous emmene chez elle, ou elle vit avec sa mere et sa grand mere. Cette derniere confectionne des jupes fabuleuses pour les gitanes du quartier. Elle en invite une a essayer un vetement. L`occasion pour nous d`en connaitre un peu plus sur leurs traditions.
Nous apprenons que les mariages sont arranges. Des l`age de cinq ou six ans, les parents decident avec qui vont se marier leur fils ou leur fille. Pas de mariage a l`eglise ou a la mairie. Il est effectif vers l`age de 12 ans. La famille du garcon couvre celle de la fille de cadeaux... argent, vetement, tapis. Les enfants suivent rapidement. La gitane que nous rencontrons a 32 ans et a deja cinq enfants. Deux de ses filles sont deja mariees.
Elle nous explique la tenue traditionnelle, qu`elle porte fierement. Deux nattes, le reste des cheveux couvert d`un fichu. Une jupe coloree, des bijoux en or... Les dents aussi, sont pour certaines couvertes d`or.
Bientot, avec sa famille, elle va fermer sa maison a double tour pour s`adonner au nomadisme dans les villes autour de Bacau, confectionner des bassines... Elle appartient a une communaute de Forgerons.
Pour notre part, nous allons prendre la route pour Brasov demain matin. Quatre heures de bus dans les montagnes. Et puis, nous avons decide de nous rendre egalement a Sibiu, mardi et mercredi, ou une jeune femme doit nous faire rencontrer des Gitans. Seulement alors, nous regagnerons Bucarest.

JOUR 5


Ferme archaïque de Lucani, où l'on fabrique du fromage de brebis.


Je redecouvre le sens des mots calme et serenite...
Nous sommes logees dans une maison de reve. Le pere de notre couch sufeur a travaille dans l`industrie du bois et a decide de faire sa maison, dans la campagne, sur le mode des chalets canadiens. La mere, institutrice a la retraite, cultive son jardin, tel Candide. Elle confectionne chaque jour des plats delicieux. Des bouillons au poulet, des choux et des feuilles de vignes farcis de viande et de legumes.
Le frere de notre couch surfeur est un guide fabuleux. Catholique parmi les orthodoxes, il nous a emmene peu avant midi dans le monastere qui jouxte sa maison. Le prete, italien mais qui parle le francais, nous a accueilli dans son eglise. Il nous a explique le symbole de chaque vitrail, de chaque mosaique construit en Italie sur le modele bysantin. Il nous a fait visiter le petit musee d`art roumain, qui fait aussi office d`atelier de poterie et ceramique pour les jeunes. Sur le flan de la colline, nous avons ensuite fait le chemin de croix, edifie en pleine nature. On en retrouverait presque la foi. Direction ensuite une ferme traditionnelle, pour ne pas dire antique, ou l`on fabrique du fromage au lait de chevre.
Dans l`apres-midi, nous avons traverse la foret, dans les Carpates. Paysages magnifiques. Et puis soudain, au loin, un aigle fend le ciel. Dans la vallee, un couple d`agriculteurs ramasse le foin a la fourche pour le mettre dans une charette en bois. Le cheval qui la tire attend un peu plus loin. Au sommet d`un chemin escarpe, un village et ce couple qui nous invite dans sa cour. La un cochon, ici, quelques poules. La vieille dame ouvre son porche, deux vaches se detachent du troupeau qui traverse le village et rentrent chez elle.
C`est tout bonnement magique.

PS : desole si je ne mets pas de photo, mais je prefere les trier en rentrant pour vous donner les meilleurs.

JOUR 4

Volcans de boue, au milieu des montagnes, près de Berca.


Levees au petit matin, nous sommes parties pour les volcans de boue, a cote de Buzau. Nous avons pris le bus direction Berca et la, il nous a fallu trouver la route pour les volcans. Aucun bus ne peut nous emmener dans les montagnes. Nous essayons une route, puis deux. Au triosieme essai, nous trouvons la bonne. Nous nous enfoncons dans les Carpates. Le paysage est tout simplement splendide. Montagne silencieuse a peine perturbee par le battement d`ailes de papillons jaunes, blancs, noirs, mauves...
Et puis soudain, le tintement d`une cloche. Au milieu des montagnes, une famille de berger emmene ses moutons et ses chevres. Ils sont la, au milieu de nulle part, comme un mirage dans le desert.
Nous continueons notre route et arrivont dans un petit village. Apres deux heures de marche nous nous arretons a l`ombre d`un bosquet pour pique niquer. De la charcuterie achetee le matin, avec du pain. Le bonheur !
Dans le village nous rencontrons un petit vieux, avec son chapeau de paille. Vasile. Il nous emmene a travers les monts jusqu`aux volcans. Sans lui, nous aurions fait des detours et certainement pas trouve ces fameux volcans de boue en ebullition.
Retour esnuite a Buzau dans un petit bus, a travers des routes chaotiques. Juste le temps d`attraper nos sacs laisses a l`hotel pour la journee et nous prenpns le train pour Bacau.
Suite au prochain episode... A l`heure ou j`ecris ces ;ots, je suis dans une maison de reve...

JOUR 3

Marché couvert de Buzau.

Nous avons quitté Bucarest dans la matinée pour nous rendre a Buzau. Deux heures de train. Cécile a eu un choc en arrivant. La ville n'était pas très accueillante, je vous l'accorde. Si on ajoute à cela un ciel gris, et personne qui parle anglais, imaginez un peu la tête de Cécile. Décomposée. Moi ça m'a fait beaucoup rire. Je ne sais pas pourquoi, mais je pressentais un potentiel dans cette ville. Pas manqué.
Nous avons tenté de visiter la ville après avoir cherché un bus qui pourrait nous emmener le lendemain aux volcans de boue. Nous sommes tombées sur un marché couvert où fleurait bon les cerises, les fraises, les tomates, l'aneth... Nous nous sommes installées sur une terrasse pour savourer une bière, et la... surprise. A côté de nous, un Roumain qui vit en France, mais été rentré dans son pays pour une semaine, pour venir chercher sa fille. Nous avons discuté. Il nous a trouvé un peu folles de faire un road trip en Roumanie, toutes les deux, sans mec pour nous accompagner. Et puis, il nous a emmener chez ses beaux-parents, manger de la ciorba (soupe) et un plat typique à base de poulet et de légumes marinés. Un délice !
Stefan, tel est son nom, nous a parlé des Roms. Il nous a affirmé qu'il existe toute une organisation pour ceux qui viennent en France. "Ici, ils vivent en famille de 20 voire 30 personnes. Quand il y en a un qui decide d'aller en France, il propose aux autres de leur payer le voyage. En échange de quoi, en France, ils devront lui ramener tous les jours de l'argent." Stefan déteste cette organisation qui creuse l'écart déjà considérable entre Roms riches et Roms plus pauvres.
Je suppose que tous les Roms qui viennent en France ne dépendent pas de cette organisation. J'espère.

JOUR 2

La chaleur est ahurissante. La temperature est montée jusqu'à 36 degrés aujourd'hui. Nous avons rencontré Julia ce matin. Une roumaine venue dans la capitale pour étudier la chirurgie vétérinaire. Elle nous a emmené voir des coins sympa de la ville. Mais je n'ai pas pu discuter énormément avec elle... je ne comprenais pas un traite mot de son anglais.

Les Roms sont partout. Ici, ils vendent des fleurs. Certains à l'arrache, d'autres dans des sortes de boutiques. "C'est un travail typiquement gitan", nous a expliqué Adina. A la sauvette, ils vendent aussi des pommes de douche, des paquets de mouchoirs, des boites de pansement, des fruits... C'est très hétéroclite. J'ai été étonnée de voir que ceux qui mendient le plus sont les vieux. Les enfants en seconde position. On les reconnait aisément à leur couleur de peau (ils sont plus typés) et à leurs habits (plus traditionnels... comme le fichu sur la tête pour les femmes).

Nous ne sommes pas allées voir le quartier rom de Bucarest. On a prévu ça pour le dernier jour, avant de repartir en France. Demain, direction Buzau et ses volcans de boue. Tout le monde nous déconseille la ville, qui, semble-t-il, n'est pas belle à voir. Mais quand on évoque les volcans, on nous comprend mieux. Nous ne savons pas encore où nous allons dormir la-bas. Nous allons appeler pour réserver un hôtel. Pas de couchsurfeurs dispo.

JOUR 1

Fils électriques dans les rues de Bucarest.

Je vous ecris depuis mon lit... à Bucarest. Nous sommes hebergées chez Octav' (21 ans) et Adina (22 ans). Grand luxe, nous avons une chambre avec terrasse, au dernier etage d'une maisonnette.

Adina nous a rejoint dans un café (Mon amour) tout proche de la piata romana. Après un repas pris sur la terrasse, direction un bar en plein air, à peine couvert de paillottes, pour déguster une bière (Ursus), avec un de leurs amis qui a du nous quitter pour aller bosser. C'est le quartier des étudiants. "Les bars ne ferment que quand il n'y a plus personne."

Nous avons très vite abordé le sujet des Roms, les Gitans comme ils les appellent ici. Octav' ne mache pas ses mots. " Ils ne font rien. Ils ne travaillent pas. Ils nous volent." Adina poursuit : "C'est pour ca qu'on a des problèmes avec eux."

Elle nous explique qu'à l'université, son professeur lui disait de les "accepter", d'admettre qu'ils ont une autre culture. Mais pas question de parler d'intégration. "On ne veut pas, et ils ne veulent pas s'intégrer." L'un comme l'autre de nos hôtes regrettent que les Roms n'aillent pas a l'école, alors qu'elle est gratuite est obligatoire.


Demain, nous tenterons d'aller voir un quartier typiquement rom de Bucarest. Et nous sommes invitées a rester dormir une nuit de plus. Demain, la troisième colloque rentre et fête son anniversaire... Why not ?!

Dernier post de France avant le départ

Eh bien nous y voilà... Demain, c'est le grand départ pour la Roumanie. C'est un ami de Cécile qui nous conduit à Beauvais, et Séverine qui viendra nous rechercher. Les sacs sont prêts. Total : 10kg. Rien que ce matin pour aller jusque la gare, j'avais l'impression que mes épaules allaient lâcher. Mais pas de panique, Cécile m'assure que nous pourrons régulièrement déposer le gros sac et ne se trimbaler que le petit... espérons-le.
Bon, ensuite, normalement, c'est direction Buzau et ses volcans de boue. Puis Bacau, où nous irons à la découverte du quartier mixte (Roms Roumains) où vit Alina. Et puis, nous nous enfoncerons dans les Carpates et descendrons jusque Brasov avant de regagner Bucarest. C'est l'itinéraire tracé. Restent les aléas du voyage, les imprévus, les surprises... Nous avons hâte.
J'essaierai d'alimenter le blog le plus souvent possible, et peut-être même, d'y télécharger des photos... A bientôt !

Départ dans une semaine

Lundi prochain, à la même heure, je serai à Bucarest. Je commence à préparer les habits qu'il faudra faire rentrer dans le sac-à-dos. Après vérification sur le net, je confirme ma décision de n'embarquer que des pantalons en toile : 35° prévus en moyenne. Gain de place et de poids. Idem pour le sac de couchage. J'ai opté pour une version ultralight (640 g de duvet - au lieu de 1,5 kg pour un classique - payés 25 euros).
J'ai investi dans une carte routière du pays, bien sûr. Et j'ai donc pu commencer à tracer l'itinéraire. Je vais le soumettre à Cécile demain. J'envisage de prendre la route pour Buzau, et passer une journée autour des lacs. Puis train jusque la Valea Seaca, à 50 km au sud de Bacau, où nous espérons rencontrer la famille de Radija.
J'aimerais ensuite rentrer dans les Carpates, sans trop s'éloigner des routes principales. Pour enfin revenir à Bucarest, par le train peut-être.
Le stress monte, l'excitation aussi... Je touche un rêve du bout du doigt : partir sac-au-dos, à la roots.

CV de Jean-Pierre Liégeois

Jean-Pierre Liégeois est enseignant à l’Université de Paris 5 - Sorbonne où il a fondé en 1979 et dirigé jusqu'en 2003 le Centre de recherches tsiganes. Il fait actuellement partie du GEPECS - Groupe d'Etude pour l'Europe de la Culture et de la Solidarité.

Ses travaux ont ouvert de nouvelles perspectives de compréhension des communautés roms, par l’examen critique des politiques menées à leur égard, par la présentation du développement des organisations politiques roms, et par la définition de propositions destinées à améliorer une situation difficile.

Depuis le début des années 1980 il a travaillé en étroite collaboration avec le Conseil de l’Europe et avec la Commission européenne. Dans le domaine de l’Education, il a notamment dirigé les premiers séminaires de formation pour les enseignants, organisés par le Conseil de l’Europe, ainsi que 7 Universités européennes d’été sur le sujet, et en 1984 la Commission européenne lui a demandé de réaliser le premier rapport européen d’analyse de la situation scolaire des enfants roms dans l’ensemble des Etats membres; c’est sur la base de ce rapport que les ministres de l’Education de l'UE ont adopté en mai 1989 la Résolution qui reste actuellement le document de référence le plus important en la matière. Sur les questions scolaire et notamment l'enjeu de la démarche interculturelle dans l'éducation, il a publié Minorité et scolarité : le parcours tsigane, Centre national de Documentation pédagogique Midi-Pyrénées, Collection Interface, 1997.


Derniers ouvrages publiés

Roms en Europe, Editions du Conseil de l'Europe, Strasbourg, 2007, 311p.

L’accès aux droits sociaux des populations tsiganes en France (sous la direction de J.- P. Liégeois) Rapport d’Etude de la Direction générale de l’action sociale, Editions de l’Ecole Nationale de la Santé publique, Rennes, 2007, 267 pages

Roms et Tsiganes, Editions La Découverte, collection Repères, 2009, 128 pages.

Entretien avec Jean-Pierre Liégeois

J'ai eu l'occasion de rencontrer Jean-Pierre Liégeois, tandis qu'il venait à Lille faire une conférence sur l'Itinéraire culturel rom, dans le cadre de Lille 3000. Voici la version formelle. Quelques questions en vrac suivront dans un prochain post.

Que vous pensez des conditions de vie des Roms dans la métropole lilloise ? Ceux qui vivent dans des bidonvilles. Quand on leur demande pourquoi ils ne repartent pas en Roumanie, puisqu'ici, ils n'ont finalement pas la vie qu'ils s'imaginaient, ils répondent que c'est tout de même mieux ici. Qu'en pensez-vous ?

Il faut me semble-t-il pour comprendre la situation démêler plusieurs fils. Dire d'abord que la plupart des Roms ne sont pas nomades, et parmi ceux qui sont mobiles, franchissant des frontières, beaucoup ne souhaiteraient pas bouger mais le font par obligation, pour s'adapter à des conditions d'existence changeantes, souvent menaçantes. Au cours de 1000 ans d'histoire, depuis l'Inde, on assiste à des déportations, par exemple du Portugal vers l'Afrique et le Brésil, de l'Angleterre vers les colonies d'Amérique et vers l'Australie. Et quand des conflits se produisent, les Roms, pris comme boucs émissaires ou bloqués entre d'autres protagonistes doivent partir, un des exemples récents étant le Kosovo, d'où la presque totalité des Roms sont partis pour survivre et se sont réfugiés dans d'autres Etats qui maintenant veulent les renvoyer sans mesurer les risques qu'ils courent. On peut mentionner aussi le fait que les caravanes, pour ceux qui vivent ainsi dans certains Etats, aient des difficultés pour s'arrêter, en raison des expulsions, entretient le nomadisme comme réponse nécessaire à un environnement rejetant.

Les Roms nomades sont numériquement peu nombreux, mais tous les Roms ont dû intégrer la mobilité dans leur existence, pour s'adapter à un rejet qui reste dominant. La montée actuelle des discriminations, dont les Roms, tous les rapports internationaux le montrent, sont les premières cibles en Europe, ne va pas entraîner une stabilisation des familles. C'est dans ce contexte que l'on doit situer la question des mouvements migratoires. On a bien connu au cours des mois derniers le rejet exacerbé qui s'est développé, jusqu'au niveau étatique, en Italie. On sait moins que récemment la Hongrie a été le lieu d'une série de meurtres dont les roms ont été victimes.

Vous mentionnez la Roumanie, et je ferai plusieurs réflexions. Je dirai d'abord que la Roumanie est souvent stigmatisée, or elle fait beaucoup pour les minorités, et pour les Roms. Certaines dispositions ou actions n'existent nulle part ailleurs, par exemple un réseau d'inspecteurs pour la scolarisation des enfants roms, par exemple la formation et l'emploi de médiateurs de santé et de médiateurs scolaires roms, par exemple un centre national de la culture rom, dans le ministère de la Culture, etc. Mais il faut dire ensuite que les conditions économiques sont très mauvaises, que les familles sont bien souvent en situation de survie, que l'échelle des mesures à prendre est à considérer à la lumière du fait que 10% de la population nationale est rom (comme si en France plus de 6 millions de pesonnes étaient rom) et enfin que en Roumanie, comme ailleurs, la discrimination à l'égard des Roms est très importante. Tout cela fait qu'ils ont intérêt à aller voir ailleurs si la situation est meilleure, et la Roumanie étant dans l'Union européenne, il n'y a pas de raison qu'en tant que citoyens roumains ils n'aient pas les même droits que les autres et puissent circuler.
Comment expliquez-vous l'arrivée massive des Roms dans la métropole ?

On parle parfois d'arrivées massives, mais il faut relativiser cela. La France n'est pas très ouverte, la plupart des Roms qui ont quitté le Kosovo, par exemple, sont allés en plus grand nombre en Italie ou en Espagne. Et une poignée de familles suscite immédiatement des réactions de rejet. N'oublions pas que les Roms sont une composante de l'Europe, ils sont avant l'heure des citoyens européens, présents dans tous les Etats et n'ayant pas d'Etat de référence, dépassant les 10 millions de personnes en Europe. Les questions qu'ils posent ne sont dons pas marginales, et les programmes développés pour eux ne sont pas des programmes pour des marginaux : ils sont au coeur des questions européennes, et nombre d'activités développées pour eux, notamment depuis plus de 25 ans par le Conseil de l'Europe, ont au contraire un effet paradigmatique, un effet d'inspiration, par exemple dans le cadre du développement d'une éducation interculturelle. Deux faits caractérisent l'Europe actuelle : la mobilité des populations, de toutes les populations, pour des raisons diverses, travail ou retraite, par exemple, et l'émergence des minorités, depuis 1990. Les Roms représentent les deux et les actions développées à leur égard peuvent aider les Etats à mieux gérer une diversité culturelle est devenue incontournable.

J'ajouterai que la question des migrations des Roms est quasi systématiquement surestimée quant au nombre des personnes concernées, et qu'elle est instrumentalisée dans le discours politique car elle vient justifier les dispositions prises en matière de contrôle et de filtrage aux frontières. La France sera probablement le dernier Etat à limiter la circulation des citoyens roumains et bulgare : la date butoir fixée dans l'Union européenne est fin 2011, mais la plupart des Etats, une majorité maintenant, ont décidé d'aligner dès aujourd'hui les droits de tous les citoyens de l'Union européenne. Depuis le début de 2009, 5 Etats ont levé les restrictions, ce qui porte leur nombre à 17, et bientôt d'autres vont suivre. Quant aux reconduites à la frontière, on sait qu'elles sont perturbantes pour les familles, inutiles et coûteuses. Un récent rapport du Sénat indique que le coût d'une reconduite est au minimum de 21.000 euros. Au lieu de reconduire 10 personnes pour 210.000 euros, ou 100 pour plus de 2 millions d'euros, on pourrait développer un bon programme d'intégration.
Que pensez-vous des villages d'insertion mis en place dans la métropole lilloise et ailleurs ?

Pour ce qui est des "villages d'insertion", il faut être prudent et voir en chaque endroit la situation de près. Comme en tous domaines, ils peuvent exister pour le meilleur comme pour le pire. Le fait d'avoir un logement décent créé de meilleures conditions de vie, ainsi que le fait de ne plus risquer une expulsion chaque jour. Il faut avoir des conditions de survie, et de sécurité, avant de pouvoir penser au travail et à la scolarisation. Ensuite, dès lors qu'on ouvre une concertation à l'occasion de ces relogements, si concertation il y a, entre les familles et les autorités, les progrès sont sensibles. Je mentionnais tout à l'heure les médiateurs roms, et on a là un exemple de situation où leur emploi serait déterminant, avec un rôle d'interface entre les autorités, la commune, et les familles. Leur formation et leur statut sont établis dans plusieurs Etats; il n'en est pas de même en France, et on a une belle occasion de commencer. Mais si ces espaces dits "d'insertion" sont comme c'est le cas dans certains lieux, des espaces d'enfermement, alors il s'agit d'une régression.

Qu'est-ce qui vous a conduit à travailler avec les Roms ?

Alors que j'étais lycéen à Dijon j'ai connu des familles roms dans deux situations difficiles, d'une part leur expulsion d'une place traditionnellement occupée par les caravanes, et d'autre part leur expulsion pour la suppression d'un bidonville. Avec des amis nous avons créé une association pour mieux organiser notre action et lui donner plus d'impact. J'ai eu aussi l'occasion de connaître des familles gitanes dans le sud de l'Espagne, et de développer des liens durables. Ce n'est que plus tard quand, étudiant, il m'était demandé de réaliser des travaux de recherche, que j'ai commencé à vraiment lire des documents, qui donnaient pour la plupart une image folklorique ou négative très éloignée de la réalité, et que j'ai travaillé dans les archives de certaines villes espagnoles. Au fil des années cela m'a mené à une thèse puis à une coopération avec le Conseil de l'Europe et la Commission européenne, à créer à l'Université un centre de recherches, et à lancer une série de publications européennes, et d'autres activités encore.
Entretien réalisé par Hedwige HORNOY